A la petite fille triste en moi

« Pleure ma fille, tu as le droit de pleurer.

Pleure, n’aie pas peur, tu as le droit d’être triste, de dire ta détresse, ta solitude.

Pleure cela te libèrera.

Pleure ma petite fille qui n’en as pas eu le droit quand tu étais enfant.

Pleure, ne crains pas.

Pleure, je suis là, tu n’es plus seule.

Pleure, personne ne te juge, personne ne te condamne,

Pleure, tu ne fais de mal à personne en laissant couler ta peine

Pleure, tu ne risques rien en laissant parler ainsi ton chagrin.

Ne crains pas de te complaire dans ta souffrance : tu lui donnes juste l’occasion de s’incarner, pour disparaître ensuite.

Pleure, la source de tes larmes finira par s’assécher.

Pleure, même si tu voudrais être gaie.

Ce n’est pas toi qui sais quand tes larmes se tariront. Tu as juste à accompagner ce mouvement naturel combattu pendant tant d’années.

Moi, adulte, je te donne le droit de pleurer, sans limite, tout ton saoul,

Je te donne ce droit et j’accueille ta peine, de manière inconditionnelle. »

En ayant pu me laisser aller à cette tristesse qui m’habitait ces derniers jours, je me suis reconnectée à moi. Comme si la distance que je sentais entre moi et ma vie a disparu, ou s’est atténuée. Je me sens à nouveau vivante.

En m’adressant à l’enfant en moi, j’ai réalisé combien la tristesse de cette enfant blessée était encore enfouie, profonde, immense. J’ai accepté cela et je me suis sentie libérée. Je ne me condamne plus d’être encore triste, et je vois combien essayer de repousser, de tenir à distance cette tristesse me coupait de moi et de la vie.

Oui, j’ai encore de la tristesse en moi. Qu’y a-t-il de mal à cela ? C’est ma vie, ma réalité, et le nier serait mensonger, injuste pour la petite fille qui est en moi et pour la femme que je suis.

En laissant s’exprimer ma tristesse, je renoue à ma fidélité à moi, si précieuse, que j’avais perdue. Je retrouve ma vérité.

En m’autorisant à vivre cette tristesse, je retrouve le goût de la vie, mon élan vital.

Encore une fois, cela me montre que je n’ai pas à avoir peur de mes sentiments profonds, quels qu’ils soient. Quand je les tiens à distance, ils me détruisent. Quand je les accueille, je m’unifie.

Marie-Pierre Ledru, formatrice agréée PRH

 

10 commentaires sur « A la petite fille triste en moi »

  1. Merci merci. Comme cet article m a particulièrement rejoint. Lors de mon dernier stage Prh « la vie en moi et ses entraves » j ai écrit une lettre à la petite Hélène. Maintenant l adulte que je suis, que je sens plus solide peut consoler la petite Hélène et accueillir ses pleurs.

  2. Merci, Marie-Pierre, pour ces mots si justes. J’ajoute juste un mot à l’attention des lecteurs de ce blog (et des lectrices intéressées) : bien sûr, les hommes peuvent vivre la même démarche. Il peut y avoir aussi un petit garçon, niché quelque part dans la sensibilité profonde des hommes, qui a dû refouler ses larmes, et qui a besoin de les laisser sortir…

  3. Superbe de vérité ce texte Marie Pierre. J ai souvent vécu en relation d aide PRH ce chemin. Laisser sortir la tristesse, la peur, la colère du petit garçon blessé pour me sentir profondément entrer en moi et sentir la vie appaisee en moi de l adulte.

  4. Merci, Marie-Pierre, pour ta fidélité à toi-même, ton humilité qui m’ouvre le même chemin de docilité, d’accueil inconditionnel des émotions de la petite fille qui vit en moi : elle a tant besoin d’être accueillie avec cette qualité d’amour. Merci Régis d’ouvrir le même chemin aux hommes que vous êtes, c’est précieux …

  5. Oui merci Marie-Pierre pour ces paroles qui me rejoignent profondément ce matin et m’encouragent à accueillir mes émotions comme la tristesse, la peur, la colère sans me tirer dessus et me forcer à entrer dans autre chose de soi disant positif qui me mettrait à distance de moi-même.

    1. J’avais déjà beaucoup pleuré la honte, la peur de l’enfant de dire qu’elle aimait et puis un jour au cours d’un analyse j’ai été assiégée par des assauts de sanglots de tendresse, des hurlements de chérissement d’une violence inconnue…je l’ai laissée, l’enfant, en proie aux convulsions du bonheur de chérir, au plaisir aigu de se l’avouer, au délire de l’aimance débâillonnée; l’enfant hoquetait de joie, hurlait sa tendresse à la face du monde. Le bonheur aussi revendique d’être.

  6. Alors même les formateurs éprouvent encore de la tristesse ?
    Ce n’est donc jamais finie cette tristesse à sortir de soi ?

    Merci Marie-Pierre de vous montrer « humaine », à nous, qui sommes en chemin de croissance…
    Merci de nous aider à vivre l’humilité et à accepter ce qui se vit/se dit simplement en nous.

    Tout n’est jamais fini à vivre ; mais tout peut se vivre avec tellement plus de bienveillance et d’amour !!!

    Quelle riche témoignage et foi en la vie profonde. Merci. VG

  7. Cet article, après m’avoir dérangée, m’a inspiré ce poème qui dit la petite fille que « j’étais  » et l’adulte que je suis ».

    Pleurer…

    Dans le fond de mon coeur
    A l’abri des regards
    Pour ne pas déranger…

    Consoler…

    Comme moi je l’ai été
    Par un regard profond
    Une forte présence…

    Comprendre…

    Dans le SILENCE des mots
    Qui ne peuvent se dire
    Mais si lourd d’émotions. ..

    Aimer

    Dans les gestes retenus
    Regard étincelant
    Et donner mon sourire…

    Vivre…

    Malgré tout,sans pleurer.
    A l’exemple de mes proches.
    Où tout est retenu…

    Sentir…

    Dans les visages fermés
    L’étincelle de tristesse
    Souffrance éblouissante. ..

    Accueillir…

    Ces partages silencieux
    Parfois insoutenables
    Sans pleurs libérateurs…

    Mais Vivre malgré tout!

    Françoise

  8. Oui pleure, petit garçon, petite fille, pleure et pleure « avec », avec celui celle qui pourra t’apprendre à nommer ton chagrin enfoui, nommer « qui » pleure et ce que tu pleures. Qui pourra t’apprendre, en nommant, à « exister dedans « et donc à traverser peines, colères, peurs qui alors, du fait de ton dénuement, ont dû rester cachées.
    Tu ne guériras pas complètement, qui pourrait le prétendre, ni les formateurs, ni quiconque!
    Mais tes pleurs diminueront dans leur récurrence, leur intensité, leurs disproportions. Cette lourdeur envahissante ne pèsera plus sur ton corps, ni ton cœur, ni ton âme.
    Alors tu pourras avec Joie et fluidité danser, chanter ta Vie, et comme le dit si joliment le grand Spinoza,  » persévérer dans l’être. »
    Nicole Langlois-Meurinne.

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