Mon maître à penser, c’est le réel

« Mon maître à penser, c’est le réel » : Il y a dans cette formule d’André Rochais, le fondateur de l’école PRH, quelque chose de légèrement provocateur qui me plaît. On peut théoriser, penser, élaborer des systèmes complexes… mais que cela donne-t-il quand on les confronte à la réalité ? Notre anthropologie, André Rochais l’a bâtie à partir de sa propre expérience du réel, et de celui qu’il observait autour de lui. Et c’est, à mes yeux, ce qui en fait sa force.

Il y a l’idéal, il y a mon désir, il y a ce qui me plairait, ce à quoi j’aspire… et il y a le réel.

Il y a mes peurs, mes projections, mes doutes… et il y a le réel.

Il y a la relation dont je rêve, ce dont j’ai besoin, le lien que j’aspire à vivre… et il y a le réel de l’autre, tel qu’elle est, face à moi, tel que je suis

Ce réel, on peut s’y heurter. Se cogner la tête contre le mur de la réalité, et se faire très mal. « J’en suis encore là ! Je n’avance pas comme je le souhaiterais. Ce n’est pas ce que j’aimerais vivre ! »

Pourtant, « se rendre au réel », comme on aime dire à PRH, est au final tellement reposant. Quand notre moi-je (notre mental, siège de nos principes, de nos idéaux) accepte de regarder les choses en face, on peut enfin construire sur du solide. Prendre les choses telles qu’elles sont, et surtout nous prendre tels que nous sommes, avec nos dysfonctionnements, nos limites, nos imperfections, mais aussi nos forces et nos ressources, c’est la première étape d’un chemin de vérité et de croissance.

Choisir le réel comme référence ultime, c’est aussi une manière très respectueuse d’avancer. « Je voudrais travailler davantage et pourtant je me sens épuisée. » Cet épuisement, c’est cela le réel que j’ai à prendre en compte si je veux pouvoir reprendre des forces et travailler de manière ajustée à mes capacités, sans aller droit au burn out

« Je voudrais tant être aimante et avoir une relation plus apaisée avec cette personne. » Alors, je mets de côté les bouffées de colère qui me viennent parfois quand je suis auprès elle. Mais comment assainir cette relation si je ne regarde pas avec lucidité cette colère en moi, qui est bien là et qui a des choses à me dire ? Une fois que je l’aurai accueillie, je pourrai alors revenir à mon aspiration à aimer mieux et poser un pas dans ce sens. Accueillir le réel tel qu’il est, et avancer avec lui, cela nous rend humbles.

En proie au doute, aux peurs ou à la rêverie, quand le fonctionnement imaginaire nous entraîne et nous amène vers des contrées fort lointaines, il est bon de se poser cette question toute simple : « mais c’est quoi le réel ? » Cela peut suffire à couper court à nos errances et nous remettre au bon endroit.

Marie-Pierre Ledru, formatrice agréée PRH

10 commentaires sur « Mon maître à penser, c’est le réel »

  1. Merci Marie Pierre de nous rendre au réel de notre quotidien, de note vie. Cette question, j avais la garde moi qui chemine avec un mental puissant… mais c’est quoi le réel que je vis aujourd’hui? Merci

  2. « Se rendre au réel […] est au final tellement reposant. » Merci pour ce rappel. Ma sensibilité apprécie et ce rappel m’invite à prêter attention à mes errances mentales pour y couper court et me « remettre au bon endroit. » Beau week-end à tous. Bien cordialement, François

  3. Merci de me rappeler cette phrase fondamentale dans le chemin de croissance. « Mon maître à penser c’est le réel » m’aide à éviter l’angélisme et donne la seule base solide au vrai travail

  4. Le réel, bâton de marche
    Pour ma part, je sens que le réel n’est pas seulement une « dure réalité » dont je dois tenir compte (on dit alors : « sois réaliste »). C’est aussi toutes les réalités que la vie nous offre : sa beauté, sa richesse et sa diversité, ses lois physiques, biologiques et on peut dire psychologiques.
    Le moi-je a certes à accepter le réel pour ne pas rêver et décoller, le corps a à s’y soumettre mais on peut dire que l’être a à accueillir, à s’ouvrir, à oser même embrasser le réel immense auquel il aspire. Le réel inclue donc la dimension spirituelle. Ainsi le réel est partout dans tout ce qui existe en moi et dans le monde. C’est quelque chose de solide sur lequel je peux m’appuyer comme sur un bâton de marche pour cheminer et devenir moi-même.

  5. Eh oui, revenir au réel. Accepter ce qui est, avant tout. Ca veut dire aussi se pardonner, être indulgent-e. Oui, je rêve de ci ou ça, mais j’en suis là, et c’est OK ! On a du mal avec ça dans notre société de la performance. Alors merci pour ce doux rappel !

  6. Thème très pertinent que tu nous proposes Marie-Pierre, et il faut du temps pour percevoir le réel et les pièges ne manquent pas. Le plus important est de distinguer le réel intérieur du réel extérieur. Quand , j’arrive à les distinguer , il y a une vraie mise en ordre qui se fait dans ma vie. Quand le réel extérieur est pris en compte par le réel intérieur, alors ma pensée s’ajuste. Mais le chemin est long …. car le réel est dynamique.

  7. Peut-on vivre sans idéal ? Personnellement ,je ne le conçois pas. Ce que vous écrivez Marie-Pierre :
    « Il y a mon îdéal,mon désir,il y a ce qui me plairait,ce à quoi j’aspire…et il y a le réel  » me rejoint en ce sens :
    L’idéal et le réel nécessitent un travail sans cesse renouvelé d’ajustement,Ils ont à « s’apprivoiser l’un l’autre pour répondre à cette quête de l’être qui aspire à la Beauté originelle de la Création.
    Merci à vous Gérard pour votre commentaire qui me rejoint dans ces mots:
    « l’être a à accueillir, à s’ouvrir, à oser même embrasser le réel immense auquel il aspire.Le réel inclut donc la dimension spirituelle. »

    Idéalisme et réalisme ,voilà un sujet de réflexion à creuser en ce temps de vacances.

    Merci Marie -Pierre

    Françoise

  8. Ah longtemps j ai fui ce réel difficile et trop difficile lorsque j étais enfant. Mon fonctionnement imaginatif m a protégé à cette époque mais une fois adulte, il m a emmené vers des horizons malencontreux avec des choix non basés sur le réel.
    Bien plus tard grâce à l accompagnement individuel en relation d aide, j ai pu commencer à conscientiser ce dysfonctionnement et à identifier sa source pour mieux l assécher.
    Un parcours de rééducation qui ne fait que commencer…
    Mais que ma vie s est déjà enrichie au contact de mon réel d aujourd’hui que je suis en capacité de regarder en face tranquillement avec toutes ses richesses et ses imperfections.
    Merci André Rochais et Marie Pierre pour l intuition de cet article.

  9. « Deux hommes sont dans leur cellule de prison, la nuit : l’un regarde et VOIT la lune dans sa rondeur lumineuse, il la contemple et s’en émerveille…l’autre ne regarde et ne voit QUE les barreaux de la cellule, il se vit dans un enfermement désespéré, impuissant ».
    Alors en effet, et toute la philosophie n’a de cesse de poser la question « qu’est que le réel ? »
    En quoi, comment peut-il bien être « mon maître à penser »?
    Le « réel » de l’aigle, de la fourmi, du vers de terre, celui du dauphin, du singe, de l’homme, de Jean, Jaques ou Paul ne sont évidemment pas les mêmes : nous découpons « notre » monde unique , non seulement à partir de nos sens spécifiques, monde « extérieur » mais nous le recevons à partir de notre monde « intérieur »….mes sens peuvent me dire la chaleur d’aujourd’hui mais je peux la recevoir en souffrant, en me plaignant ou…peut-être pas ?
    Alors con-sentir au réel, m’y « rendre », c’est-à-dire aller jusqu’à…. « être avec », avec mes sensations, les accueillir et les laisser parler, qu’elles soient de Lumière où d’enfer-mement, agréables ou désagréables, serait-ce là en effet le chemin proposé par le Maître pour sortir de nos dualités, corps- esprit, esprit-matière, moi-l’autre, intérieur-extérieur, sortir de nos ambivalences séparatrices comme le dit Marie-Pierre, doutes, peurs, rancœurs qui nous coupent sans cesse de nous, des autres….du Réel ! Chercher une sorte « d’accord », de corps à corps, de cœur à cœur avec ce qui EST, retrouver là l’unité, cette expérience du Un dont nous parlent les mystiques autant que les physiciens et dans laquelle la question du réel ne se pose plus…. communion dans le moment présent…des vacances !

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