Educatrice de jeunes enfants, puis conseillère conjugale, Odile Anot a été ensuite rédactrice en chef du magazine Montessori, L’Enfant et la vie. En 2010 elle a créé les Ateliers Parent-Chercheur®, une auto-formation à la parentalité, et des conférences éclairées par la pédagogie montessorienne. En parallèle elle s’engage dans la formation PRH qu’elle découvre à 21 ans ; elle y apprend le discernement et une solide connaissance d’elle-même, ce qui lui a permis d’oser ces différentes professions consacrées à l’accompagnement des enfants et des parents, dans un lien toujours plus évident à la pensée de Maria Montessori. La voilà désormais auteure puisqu’elle a rassemblé sa connaissance et son expérience, dans un livre, Montessori au cœur de la vie de famille (éd. Dunod). Elle est aussi maman de trois garçons qui ont aujourd’hui entre 22 et 30 ans.
PRH : Comment avez-vous découvert la pédagogie Montessori ? Qu’est-ce qui vous séduite dans cette approche ?
Odile Anot : Devenir maman m’a bouleversée, bousculée, c’est alors que je me suis rapprochée d’un centre Nascita Montessori : ce sont des espaces de recherche et de ressources en parentalité, voulus par Maria Montessori. J’y ai fréquenté des personnes qui s’étaient formées auprès de proches disciples de Maria Montessori. Je me suis alors passionnée pour cette pédagogie, mais ce n’est que lentement que j’en ai découvert la valeur anthropologique, spirituelle et scientifique, m’amenant à changer de regard et de pratique. Et je ne suis pas encore au bout !
PRH : Pourriez-vous nous présenter en quelques mots ce qu’est la proposition Montessori en matière d’éducation ?
Odile Anot : Maria Montessori a découvert, avec d’autres, que l’enfant, à sa naissance, est habité d’un processus interne de développement. En effet, tout enfant naît avec un élan vital qui lui est propre, une ouverture sur le monde qu’il veut comprendre pour s’y sentir à l’aise et une aspiration puissante à l’autonomie. Les parents peuvent « se reposer » sur cette dynamique intérieure qui s’achève vers 24 ans, après que l’enfant a traversé quatre métamorphoses où il additionne toutes les caractéristiques qui font l’homme. Le travail des parents et des éducateurs est d’être en phase avec cette réalité constitutive du petit d’Homme, ce qui l’oblige à l’observer afin de mettre en place une réponse éducative qui soutienne cet élan de vie, plutôt qu’un obstacle, par méconnaissance. Mais pour voir, il faut choisir les bonnes lunettes, celle du parent-chercheur.
PRH : C’est quoi, un parent-chercheur ?
Odile Anot : cela implique que le parent, l’adulte accompagnateur, se mette dans une attitude de chercheur, se pose objectivement la question : « Qui es-tu, toi mon fils, ma fille ? Qu’est-ce que tu me dis de toi, de tes élans déployés ou détournés actuellement ? » Mais aussi, habité de tout son amour ou son affection envers cet enfant : « Quelle est ta singularité ? »
C’est une attitude très dynamique qui implique d’avoir l’esprit ouvert en éducation et de laisser de côté croyances, attentes sur l’enfant et représentations sur l’éducation, recettes ou diktats. Le parent chercheur se coltine au réel, se laisse surprendre par ‘le vivant’. L’un et l’autre quittent alors une forme de guerre entre eux pour vivre une relation éducative créative, personnalisée, souple et ferme aussi parfois. Pour Maria Montessori, qui a traversé les deux guerres, ‘l’éducation est la meilleure arme pour la paix’ ! Telle est mon expérience. C’est aussi l’espérance au cœur de mon travail et de ce livre, qui m’a pris deux années d’écriture intense et jubilatoire.
PRH : Vous venez de publier Montessori au cœur de la vie de famille (éd. Dunod). Que désirez-vous transmettre à travers cet ouvrage ?
Odile Anot : Montessori est à la mode. A la fois parce que le monde du business s’en est emparé, mais aussi parce que, bien avant la percée des neurosciences de l’affectivité, des pionniers ont cru, avec ardeur et preuves à l’appui, en le travail de Maria Montessori. Tout au long de cet ouvrage, j’ai à cœur de démontrer, avec de nombreux apports issus des Ateliers Parent-Chercheur, des écrits de Maria Montessori et de mes rencontres avec les acteurs Montessori en France, combien le lieu de la famille peut être nourri par la pensée montessorienne. Les instituteurs passent, mais les parents restent !
C’est un livre qui invite, dans sa première partie, à connaître l’enfant entre 0 et 24 ans et les lois de son développement. Dans sa seconde partie, on entre dans une auto-formation guidée qui développe les attitudes du parent chercheur, telles que – porter un regard neuf sur l’enfant, – Aider l’enfant à grandir avec ce qu’il ressent, – Faire le lien entre le comportement et l’élan naturel de l’enfant, – Mettre en place une autorité qui vise l’autodiscipline, – etc. Ces attitudes permettent d’affirmer son immense potentiel de parent, tout en se laissant guider par son enfant (non pas mener !), et cela dans des situations quotidiennes de la vie, comme dans les événements. Cette pratique est à la fois une source de joie et une force dans l’adversité. Enfin, j’ai tenté, dans sa troisième partie, de vous rendre proche, l’histoire et l’œuvre de Maria Montessori pour mieux l’enraciner dans le XXIème siècle et dans vos cœurs.
PRH : Vous citez la formation PRH dans votre livre. Que vous a-t-elle apporté ?
Odile Anot : J’ai découvert PRH en 1982, j’étais jeune, et pourtant il était temps, car j’avais besoin d’un cadre afin de conquérir ma vie dans cette période où je balançais entre deux camps, et cela dans une grande autonomie. J’y trouvais une vision de l’Homme et de sa destinée, qui rejoignait profondément ce à quoi je croyais. Si je n’avais pas rencontré cet outil de formation humaine pour adulte, je ne crois pas que j’aurais mis l’ordre nécessaire au déploiement de ma singularité, ni n’aurais eu l’audace de me lancer dans les différents métiers que j’ai exercés, en fidélité à ce qui fait l’essentiel de mes engagements. Grâce à l’outil du discernement et de l’analyse de mes sensations, acquis là, j’ai le sentiment d’accomplir ma vie et apporter une contribution à la révélation de la beauté de l’humanité et permettre son harmonie au sein de l’univers.
Nous parlions de cette notion de parent chercheur : eh bien c’est dans une formation PRH autour de la parentalité qu’elle m’est venue en ces termes tout simples et ressentis avec force, alors que nous étions jeunes parents : « nous sommes des parents chercheurs ! ». Quelques années plus tard, ce terme s’est imposé à nouveau alors que je cherchais à nommer ce qui m’habitait pour la ligne éditoriale de la revue L’Enfant et la vie, dont j’étais devenue la rédactrice en chef. Puis j’en ai affiné le contenu selon moi, et y ai trouvé ‘Montessori’ une fois encore.
PRH : Quelles sont les convergences entre la formation PRH et la pédagogie Montessori ?
Odile Anot : Elles sont nombreuses. Sans tout développer, en voici quelques-unes :
– Le regard sur la personne (enfant ou adulte) est global ; elle n’est pas découpée en tranches, en thématiques, en problématiques à gérer ou en zones du cerveau.
– La posture éducative vise le déploiement du potentiel qui habite chaque être, dans une démarche qui favorise sa prise d’autonomie ; pour cela la relation est sincère, discrète, proche, force de propositions aussi, marchant au pas de l’autre. On y goûte cette foi profonde en tout être humain et en son élan vital.
– « Mon maître à penser, c’est le réel » dit André Rochais, fondateur de PRH. L’éducateur Montessori cherche lui aussi « la vérité de l’enfant ». Il s’agit d’accueillir et d’accompagner cette humanité en formation, parfois bien maladroitement quel que soit l’âge.
– La vie intérieure y est nommée comme une réalité constitutive de l’être et perçue telle une direction incontournable pour qui veut déployer toute son humanité, découvrir qu’il est habité d’une source vivifiante sans fin, quelques soient les peuples et les histoires. La proposition Maria Montessori, tout comme celle d’André Rochais, existent sur tous les continents.
J’aime profondément ces deux réalités; elles sont de puissants ferments de transformation sociétaire, chacune à sa mesure. Je leur suis intimement reconnaissante.
PRH : Qu’aimeriez-vous dire à nos lecteurs parents, grands-parents… en guise de conclusion ?
Odile Anot : Puisqu’il vous est donné d’accompagner cet explorateur né qu’est l’enfant, l’adolescent, vers l’accomplissement de sa propre vie, laissez-vous donc saisir par sa puissance de vie. Chaque enfant, est une œuvre d’art ! Alors, vous trouverez les réponses à bien des défis du monde, et vos âmes se rencontreront et jubileront de ce qui s’est tissé tout au long des jours.
Propos recueillis par Marie-Pierre Ledru, formatrice agréée PRH
Laisser l’autre s’ouvrir à la vie
Laisser l’autre observer, s’émerveiller, chercher à comprendre, tâtonner
Respecter le rythme de l’autre,
qui n’est pas forcément le même que le mien
Laisser venir la demande, le questionnement de l’autre,
Respecter son cheminement intérieur,
car c’est laisser la place pour qu’il mette en place
son fonctionnement et ses réflexion-construction intérieures
La revue L’enfant & la vie, l’ouverture au rythme de l’autre de Maria Montessori et PRH m’ont fortement aidée dans l’éducation de mes 3 enfants, dans ma croissance & ouverture intérieure, et dans mon précédent métier d’enseignante en maternelle.
Merci Odile et Marie-Pierre
pour ce beau témoignage, à continuer de transmettre.
VG
Merci Valérie, quelle joie de transmettre les uns par les autres. votre avis sur le livre m’intéressera à votre heure, sans urgence. Il n’y a pas deux écritures semblables, il n’y a pas deux rythmes semblables nous dit Maria MOntessori!
Merci Odile et Marie-Pierre!Vous lire me donne de jubiler et de m’agenouiller devant la puissance de la vie!
Je suis profondément rejointe et confirmée en ce que j’ai vécu, maman et enseignante , et en ce qui me passionne aujourd’hui, grand’mère de 8 Petits , et encore chercheuse de la vie, en PRH depuis que je l’ai reçu!
Accompagner la vie, accompagner cet explorateur de vie qu’est l’enfant!
Quel bonheur et quelle responsabilité!
Je souhaite moi aussi »apporter une contribution(la mienne)à la révélation de la beauté de l’humanité »Ma gratitude à l’Artiste aussi!Ne sommes-nous pas chacun, une oeuvre d’art?
Très rejointe aussi par les mots de Maria M:l’éducation est la meilleure arme pour la paix » Oui! MERCI!
Être chercheuse, ouverte, à l’écoute, regarder globalement, accueillir, faire grandir. …oui, j’y adhère !
j’apprécie beaucoup ces réponses d’Odile à Marie-Pierre, qui éclairent la convergence des visées de PRH et de l’esprit Montessori pour le déploiement d’une personne, notamment dans cette période si sensible de l’enfance.
Merci pour le bon goût que vous donnez du travail d’accompagnement, outil très précieux en ces temps de flottement de nombreux repères.
Oui, l’oeuvre d’art est là, chez chacun; quelle belle mission que de participer à sa révélation! Puisse le livre y entraîner de nombreux parents-chercheurs!