Cette semaine c’est un poème qui nous accompagne…
MON CORPS
Je demande pardon à mon corps
de l’avoir traité ainsi
je lui ai dit qu’il était laid
alors qu’il était fort
je lui ai dit qu’il était lourd
alors qu’il était vif
je demande pardon à mon corps
de lui avoir coupé les griffes
je lui en ai voulu vingt ans
à cause des fesses des seins
du ventre des dents des bras
je l’ai caché car j’avais honte
de dire ce corps c’est moi
je demande pardon à mon corps
qui est un ami fier et brave
qui est un travailleur docile
qu’il me pardonne mes insultes
il était si fidèle et pourtant si fragile
je lui ai dit qu’il était nul
alors qu’il bataillait
je lui ai dit qu’il était moche
alors qu’il sanglotait
je demande pardon à mon corps
il a grandi avec mes mots
comme partenaires
ils ne veulent plus jouer à la guerre
et je veux vivre encore
je lui ai dit qu’il était lâche
pendant qu’il balbutiait
et quand il me parlait
je ne l’écoutais pas
je demande pardon à mon corps
et je lui dis merci
pour sa confiance et son honnêteté
pour ses plaisirs et sa manière
de n’être jamais bien droit
je lui demande pardon
de lui avoir demandé d’être
tout ce qu’il n’est pas
Cécile Coulon.
Romancière

Je lis le poème de Cécile Coulon.
Je pense aussi à ce que j’avais entendu lors de mes sessions PRH et de la place du corps dans le schéma de la personne : « tenir compte de ses forces, de ses limites ».
Alors, oui, le poème de Cécile Coulon montre une transformation, un autre regard… et c’est important !!! Dans le quotidien de nos sociétés occidentales actuelles, usines à burn out, ne pas lutter contre son corps, s’en rapprocher, l’écouter, respecter ses limites, entrer en amitié avec lui, etc. c’est une vigilance permanente à avoir !!! C’est une base essentielle et il faut (parfois/souvent) lutter pour la maintenir.
… mais par ailleurs, à la lecture des mots « ami fier et brave », « travailleur docile », je ressens un profond malaise. Dans mon ressenti, il me semble que la transformation décrite aboutit encore / de nouveau à une forme d’instrumentalisation du corps, qui reste encore comme un ‘outil’, comme ‘extérieur’, comme un « en dehors de soi’. Et de tout mon être, je trouve cela injuste… et tout mon corps s’insurge avec moi ! 😉
Il y a le corps que JE SUIS. JE SUIS, indissociablement de mon corps. Vraiment ÊTRE, comme être humain, c’est être un corps, avec des sensations corporelles qui, agréables ou vraiment pénibles, restent une bénédiction, parce que c’est d’abord à travers ces sensations corporelles, cette proprioception, ces sensations internes… que s’ouvre tout mon monde intérieur, dont la découverte est à chaque fois neuve, jeune, vibrante, connectée à un mouvement de Vie. Mes émotions, mes crispations intérieures, certaines pensées obsédantes, certaines blessures anciennes toujours présentes, mes élans d’être, mon bien-être, mon agir, mon amour… c’est à travers mes sensations corporelles que je les vis. Indépendamment de son âge, de son état de santé ou de maladie, de sa mobilité ou de son immobilisation, mon corps m’offre toujours cette potentialité inouïe de rentrer dans la profondeur de la sensation (le toucher du drap sur ma peau, ma respiration, ce point de douceur ou de douleur, un geste en conscience…), et par là, d’entrer dans une vraie Présence, de sentir un espace s’ouvrir, le moment s’approfondir… parfois, je peux même sentir un petit moment d’éternité, quelque chose de plus grand que moi…
Cela peut paraître paradoxal, mais à mon âge actuel, j’ai la certitude que le premier lieu de guérison, l’ouverture pour accéder à ce que je suis en profondeur, ou à un moment de ‘spiritualité’ (au sens large), c’est d’abord par le corps que ça passe.
Ce que j’ai aussi appris par l’expérience, même si je n’arrive pas encore toujours à l’appliquer, c’est que si ma tête dit quelque chose et que mon corps dit autre chose, c’est toujours mon corps qui a raison (!) 😉
Merci pour votre partage. Ce poème n’a pas été écrit par quelqu’un de PRH, il décrit une relation particulière au corps qui peut vous heurter, et c’est bon que vous l’exprimiez. Merci de nous partager que le corps est le lieu privilégié de notre croissance. Et qu’il est indissociable de l’être. C’est aussi ce que nous expérimentons dnas les stages PRH sur le corps.
Je suis vraiment surpris du contraste entre mon adhésion à ce que vous écrivez adhésion nourrie par mon expérience de praticien en Focusing et la différence de réactions aux mots de ce poème.
Pour moi ces mots sont une autre façon d’exprimer la même reconnaissance pour le corps depuis un espace de conscience nécessaire à cette reconnaissance aimante sans risque d’aboutir à et une instrumentalisation. Peut-être y a-t-il là une peur à aller explorer ?
Bien chaleureusement,
François
Ce poème est écrit pour moi. Il m’encourage à aimer totalement mon corps.
Merci Michel pour votre partage. Oui, aimez votre corps, il vous le rendra !
Magnifique poème qui me touche profondément. Je ne vis pas toujours très bien dans mon corps alors que c’est lui qui incarne tous mes désirs