Un texte de Carl Rogers

C’est en 1966 que parut en traduction française le livre de Carl Rogers « Le développement de la personne ». L’ouvrage eut alors une grande audience dans le monde de la psychologie humaniste. André Rochais s’y intéressa particulièrement, car il confirma et enrichit sa propre recherche. Le succès rapide des formations qu’André Rochais commença à donner sur la personnalité conduisit à la création de l’association PRH en 1970.

Nous vous proposons aujourd’hui un extrait de l’ouvrage de ce grand psychologue américain, dans lequel il met le projecteur sur  le fait de « pouvoir se permettre de comprendre une autre personne ». Formule surprenante à première lecture et qui l’amène à nous donner une analyse fine de nos résistances à cette démarche, très importante à ses yeux.

Comment accueillerez-vous ce texte ? Serez-vous éclairés ? Convaincus ? Étonnés ? Dubitatifs ?  A voir. En tout cas le sujet mérite attention.  Bonne lecture à chacun.e, et n’hésitez pas à partager vos réactions.

J’en arrive maintenant à une expérience fondamentale qui a pour moi une très importante signification. Je pourrais l’exprimer comme suit : j’attache une valeur énorme au fait de pouvoir me permettre de comprendre une autre personne. La façon dont je formule cette constatation peut vous paraître étrange. Faut-il donc se permettre de comprendre une autre personne ? Je le crois. Notre première réaction lorsque nous entendons parler quelqu’un est une évaluation immédiate, un jugement plutôt qu’un effort de compréhension. Si une personne exprime un sentiment, une attitude ou une opinion, nous avons tendance à penser aussitôt : « c’est juste », ou « c’est stupide » ; ou encore « c’est anormal », « ce n’est pas raisonnable », « c’est faux », « ce n’est pas bien ». Il est rare que nous nous permettions de comprendre exactement le sens qu’ont ses propres paroles pour celui qui les exprime. Il me semble que cela provient de ce que la compréhension comporte un risque. Si je me permets de comprendre vraiment une autre personne, il se pourrait que cette compréhension me fasse changer. Or, nous avons peur du changement. C’est pourquoi je dis qu’il n’est pas facile de se permettre de comprendre un individu, d’entrer entièrement, complètement et avec sympathie dans son cadre de référence. C’est aussi quelque chose de très rare.

C. Rogers dans « Le développement de la personne »

6 commentaires sur « Un texte de Carl Rogers »

  1. Ce texte me rejoint profondément.

    Je m’étonne qu’encore aujourd’hui il reste rare de se sentir écouté pleinement. Mais des changements opèrent, Carl Rogers a essaimé, et PRH continue d’oeuvrer pour une meilleure écoute dans le monde.

    C’est si important de pouvoir se permettre de s’écouter soi-même ! C’est une étape fondamentale, pour aller plus loin dans l’écoute de l’autre. Promesses de rencontres riches à venir, où l’union fait la force, et non la guerre…

    1. Oui, Claire, c’est juste : commencer par s’écouter soi-même, c’est nécessaire pour bien écouter l’autre. Et ce n’est pas toujours facile d’ailleurs.

    • Le 1er mot qui me touche : « se permettre ». Il faudrait  il donc se permettre de comprendre une autre personne. Cela sous entend une réticence spontanée et première à comprendre l’autre  . Plus encore,il y aurait même un « interdit » puisque je dois donner une « permission » . Il me faut donc user de mon « vouloir » pour me donner la permission.
    • Carl Rogers utilise un autre mot qui me touche encore plus : le mot  « pouvoir » se permettre. Le vouloir semble donc insuffisant. Carl Rogers semble dire que certains, par delà de leur bonne volonté, n’auraient pas la « possibilité » de se permettre de comprendre l’autre. 

    Il y a donc, pour moi, des questions qui découlent de ce texte et du travail à faire … 

    1. Oui, ces quelques lignes ouvrent sur de nombreuses questions… Parfois, quand on veut écouter l’autre, il y a du brouillage sur notre ligne intérieure. Cela demande d’être suffisamment désencombré pour accueillir l’autre.

  2. Bonjour,

    Merci pour cette enrichissante et instructive publication.

    Ma modeste expérience sur la croissance de la personne selon la pédagogie PRH à laquelle je me suis engagée à son développement, qui pour moi un développement à vie , me permet d’être en phase avec une expérience fondamentale de Karl Rogers et qui a comme signification importante « j’attache une valeur énorme au fait de pouvoir me permettre de comprendre une autre personne ». Cette attitude de comprendre la personne est pour moi fondamentale dans la relation d’aide ou d’écoute de PRH. Aussi dans nos différentes relations avec les autres personnes nous rééduque ou réajuste dans notre dysfonctionnement de jugement , de comparaison avec soi, d’évaluation, …

    je pourrais dire aussi rajouter que la compréhension de l’autre nous est plus facile et plus ajustée quand on a expérimenté sa propre compréhension .

    Gratitude à tout ce que PRH et ses formatrices, formateurs nous aide a nous transformer et grandir dans ce que nous devons être

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