J’ai longtemps été prisonnière des griffes acérées de la comparaison. Quelles que soient les circonstances, les événements, les rencontres, je regardais comment agissaient les autres, et je trouvais que c’était toujours mieux que ce que moi, je faisais.
J’avais toujours le regard tourné vers l’autre : il devenait mon référentiel, l’aune à laquelle je me jugeais. Et ce jugement n‘était jamais positif. Pourquoi ? Parce que je ne regardais que les personnes que j’estimais supérieures à moi. Me comparer à des personnes qui faisaient « moins bien » que moi ne me traversait pas l’esprit. La comparaison était toujours en ma défaveur.
Ce mécanisme de comparaison, qui est l’un des dysfonctionnements qui accompagnent l’image négative de soi, est un enfer. Il ne nous laisse jamais tranquille. Il nous amène à nous dévaloriser, à nous juger, ce qui renforce bien sûr l’image négative… On est coincé !
Comment suis-je sortie de ce fonctionnement ?
Tout d’abord, il y a eu la prise de conscience de la nocivité de ce mécanisme. J’ai mis du temps à en percevoir l’ampleur et les dégâts qu’il causait dans ma vie. Cette prise de conscience a été un électrochoc. « Je ne peux pas me laisser gâcher la vie de cette manière ! » Ce fut comme un sursaut de vie en moi. Le travail pouvait démarrer.
L’effort le plus important a été de ne plus m’accrocher aux autres mais de porter le regard sur moi, sur mes réalités d’être, sur ce qui me caractérise. A PRH on parle de notre « couleur ». X ou Y ont telles qualités bien utiles dans cette situation. Et moi ? je n’ai peut-être pas ces qualités-là, mais quelles sont celles que moi je peux apporter ? Qu’est-ce que j’ai à donner de particulier, d’unique ? Cela n’a pas été simple. Il a fallu combattre mes réflexes et faire un effort conscient pour revenir à moi, dans chaque situation. Une rééducation longue mais payante.
J’ai aussi dû apprendre à ne plus établir de hiérarchie entre les qualités des autres et les miennes. J’ai pu y parvenir quand j’ai compris que c’est la diversité qui fait la richesse. Là aussi, cela m’a pris du temps. « Il faut de tout pour faire un monde », dit le bon sens populaire. Je me suis fait attentive à la valeur de ce que moi j’apportais. Mon goût de la vérité, mon authenticité, ma vitalité… pouvaient changer des choses, j’en ai fait l’expérience et je me suis nourrie, fortifiée de cette expérience. J’ai longtemps eu une forme de complexe avec la profondeur. J’ai travaillé à déconstruire mon image de la profondeur sérieuse, austère. En lâchant cette image monolithique de la profondeur, je me suis apprivoisée avec ma propre manière d’être profonde. Je peux être profonde et gaie, profonde et légère.
Ma dernière bataille fut de désacraliser les personnes que je mettais sur un piédestal (les formateurs PRH en premier lieu !). Chacun de nous a des fragilités, des blessures, des limites. Personne n’est parfait. La perfection n’existe pas en fait. A mesure que j’avançais et gagnais en lucidité, j’ai pu observer que les personnes que j’admirais le plus, qui faisaient « tout bien » était souvent victimes d’un perfectionnisme dont moi-même j’essayais de sortir. Réaliser cela m’a bien calmée. Je ne veux plus vivre ainsi ! Je choisis un chemin plus doux, plus respectueux de moi.
Aujourd’hui je me sens vraiment plus libre. Je ne suis pas à l’abri d’une rechute – par exemple quand je vis de l’insécurité – mais quand la comparaison pointe son nez je la débusque très vite. Stop ! Je reviens à moi, je me recentre en écoutant ce qui vit en moi, ce qui est important pour moi, ce qui a du sens.
A tous ceux qui se reconnaissent dans cette description, je voudrais dire combien il est important de prendre au sérieux vos qualités. Et si c’est difficile de le faire, faites confiance aux personnes qui vous font des reflets positifs. Ne vous fiez pas à votre propre regard sur vous qui vous juge et vous paralyse. Cela, c’est le cœur même du dysfonctionnement. Osez vous en remettre à des personnes qui ont foi en vous, qui voient le beau de vous.
Marie-Pierre Ledru, formatrice agréée PRH
Merci Marie-Pierre pour ce rappel et ces différentes prises de conscience pour se sortir de cet enfermement qu’est la comparaison. Ce qui m’interpelle particulièrement : « Faire confiance aux personnes qui nous font des reflets positifs » dont, souvent, je minimise les propos, voire je n’entends pas.
Merci Marie Pierre pour cet éclairage fulgurant ! Je me reconnais complètement dans ce dysfonctionnement qui pourrit la vie. Je retiens ce long et lent chemin de rééducation à entamer : chaque fois reporter le regard sur moi, qu’elle est ma couleur à moi ? Ne pas hiérarchiser les couleurs individuelles. Me faire aider de quelqu’un qui me connaît bien pour bien voir mes nuances propres. Merci pour cette fine analyse d’un dysfonctionnement si pénible.
Et vive la profondeur joyeuse, vive la joie profonde d’être soi, rien que soi, mais tout soi !
Tant mieux si ce témoignage t’éclaire Camille ! Bonne rééducation, en regardant toujours les pas déjà posés et non le chemin qui rste à faire.
merci Camille. je me réjouis que cet article puisse t’aider. Bonne rééducation, un pas après l’autre.
Merci Marie-Pierre, pour ton témoignage qui me parle et m’éclaire.
Merci Marie-Pierre, je reprends vos mots, pour moi importants: je veux me faire attentive, de façon responsable, à la valeur de ce que moi j’apporte… Puis, j’ai en moi, depuis longtemps, un verset évangélique: « la vérité vous rendra libres »… une aspiration forte que je peux vivre dans un bon fonctionnement … un long chemin, mais ce soir, je suis heureuse avec vous et pour moi… merci de ce partage.
Bonjour Susanna, Je suis d’accord avec vous : la vérité est un pilier pour avancer. bonne route !
Merci pour cet article !
La notion de complémentarité m’a beaucoup aidée à ne pas me dévaloriser… « ce n’est pas l’un ou l’autre, mais l’un et l’autre ».
OUI les reflets positifs font énormément de bien, mais rares sont les personnes qui pensent à en faire ! Alors je ne louperai plus aucune occasion d’en faire aux autres.
Apprendre à recevoir les reflets positifs n’est pas non plus évident.
Bonjour Marie-Odile, Oui vous avez raison. apprendre à recevoir les reflets positifs n’est pas simple. En faire soi-même est un bon moyen pour s’entraîner à en recevoir, peut-être ?
Merci Marie Pierre, quel chemin ! Ça me donne envie d’avancer sur mes propres dysfonctionnements et mieux comprendre celui-ci.
Mais au fond qu’est-ce qu’ un «reflet positif »?
Et pourquoi donc sont-ils si difficile à recevoir…. si difficilement « crédibles »?
Pourquoi et pour quoi « faire » un reflet dit positif?
Il y a une sorte de consensus autour de ce qui peut devenir une « technique de croissance » : « c’est bon pour la personne d’entendre un reflet sur une de ses richesses, de ses forces, cela l’aide à grandir »…. Est-ce si sûr ?
Il peut y avoir une sorte de reflet qui est comme une évaluation, une observation, un jugement dusse-t-il être positif »…
Celui qui le prononce se fait plaisir de « faire plaisir à l’autre »…. qui justement, de ce fait, va trouver difficile de croire à ce que l’on cherche à lui dire….
Pour moi il s’agit davantage de Joie partagée que de reflet…
« je suis vraiment heureuse de te voir ainsi nourrir ton lien à..de te voir entrer dans ta force,…dans tel de tes dons.. cela me rend vraiment joyeuse de voir à quel point tu es Vivant d’habiter ainsi telle de tes « facettes » de diamant, de te voir déployer ainsi les ailes de ton unicité »….
Au fond, pour vraiment recevoir un « reflet » j’ai besoin d’en-tendre ( et pas seulement d’écouter), j’ai besoin de ressentir à quel point l’autre, là Parole de l’autre dit sa Joie à ma propre Joie …. Celle d’un moment où je vis un plus d’existence… qu’il perçoit et me redonne, un partage.
Au fond il s’agit de résonances : ma Joie d’émerveillement face à la Joie de l’autre en son unicité.
Merci pour ce beau partage inspirant : revenir à soi, à la vérité de ses propres qualités et apprendre à les voir chez soi comme chez les autres, un beau chemin vers l’harmonie, non ?
Si l’harmonie peut naître de cette mise en vérité, tant mieux !